Posturothérapie : le journal de la posturologie de Lisbonne

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vendredi, septembre 30, 2005

61/ Instabilité posturale chez le sujet âgé


Plusieurs stratégies permettent de prévenir les chutes et les blessures chez les sujets âgés.

Les déficiences qui résultent du vieillissement « normal » des différentes structures et processus participant à l'intégrité du contrôle postural et de la fonction d'équilibration peuvent être à l'origine d'incapacités de communication et de locomotion, responsables à leur tour de multiples handicaps.
Les pathologies neurosensorielles et neuropsychiques, la dénutrition protéino-énergétique et la sarcopénie s'associent fréquemment à ces déficiences et concourent à favoriser l'instabilité posturale.
Elles rendent compte ainsi de l'augmentation dramatique de l'incidence des chutes, dont les conséquences fonctionnelles - mais aussi psychologiques et sociales - sont considérables. Ces dernières peuvent en effet être à l'origine d'une régression psychomotrice avec perte d'autonomie, elle-même source d'une morbi-mortalité élevée.
Tout cet enchaînement contribue pour une large part à l'hospitalisation et à la mise en institut des personnes âgées. Ainsi, 30% des hommes et 40% des femmes parmi les 758 sujets âgés de 75 ans et plus, interrogés à Göteborg en 1987, signalaient une instabilité posturale, responsable de chutes dans 10 à 20% des cas [1].


Dans l'enquête effectuée plus récemment par questionnaire postal auprès de 1 000 sujets âgés de plus de 65 ans dans la région d'Edimbourg, vivant à domicile [2], la prévalence des sensations de vertige (verbalisées comme un vertige, un étourdissement, une instabilité posturale ou un étourdissement) est de 30%.
Parmi leurs déterminants, l'atrophie musculaire consécutive au déconditionnement physique joue un rôle important. La diminution de la force musculaire qui en résulte a été corrélée à la vitesse de la marche et au risque de chutes dans de nombreuses études.

Face à ce fléau, véritable problème de santé publique - à l'origine de coûts médical, financier et social élevés - la priorité doit être donnée aux stratégies préventives.

La rééducation, qui s'adresse en particulier à l'appareil locomoteur et au réflexe opto-cinétique, trouve naturellement sa place dans la prévention et la prise en charge des incapacités, en complément de la prise en charge d'éventuels troubles nutritionnels.
Les activités physiques pourraient occuper une place de choix dans la prévention primaire des déficiences qui résultent du seul vieillissement physiologique ; elles pourraient prévenir l'aggravation des déficiences et incapacités réduites par le vieillissement pathologique. L'inactivité physique - mais également intellectuelle, sociale, relationnelle - représente, à côté des facteurs environnementaux et nutritionnels, un des déterminants extrinsèques du déclin fonctionnel associés à l'avancée en âge.
L'hypothèse d'un véritable « déconditionnement de la fonction d'équilibration » engendré par l'inactivité physique et réversible sous l'effet de l'activité physique peut être avancée.
Les activités physiques freinent le déclin des performances locomotrices et de la capacité aérobie, limitent les incapacités et réduisent la mortalité.
Il est donc intéressant de s'interroger sur leurs éventuels effets sur le contrôle postural et la fonction d'équilibration.

Plusieurs études ont pu montrer les bénéfices de l'activité physique sur l'incidence des chutes.
Lord et al. [3] ont évalué l'impact d'un programme de 12 mois associant exercices aérobiques, de force, d'équilibre, d'endurance, de souplesse et de coordination chez 75 sujets âgés de 60 à 85 ans.
Comparativement à un groupe témoin de même âge, les sujets soumis à ce programme ont amélioré très significativement leur force musculaire, leur temps de réaction, leur contrôle musculaire, leur équilibre sur surface ferme yeux ouverts et sur surface mobile yeux ouverts et fermés.
Le nombre de chutes survenant sur la période de suivi s'est avéré moindre chez les sujets les plus compliants au programme.
Ces mêmes auteurs ont étudié, sur un sous-groupe de cette population, les effets d'un programme d'entraînement conduit selon les mêmes modalités sur l'équilibre dynamique [4].
En comparaison à un groupe témoin de même âge, les sujets soumis à ce programme ont amélioré très significativement leur équilibre dynamique.
Ces résultats corroborent ceux de Hu et al. [5] qui ont mis en évidence une amélioration de l'équilibre et une moindre incidence des chutes chez des sujets soumis à des exercices mettant en jeu les entrées visuelles, vestibulaires et proprioceptives.
Cette influence bénéfique de l'activité physique sur le contrôle postural apparaît plus nette chez les individus à faible niveau de santé.

Pr C. Jeandel
CHU Nancy-Brabois
article du 19 avril 1999