"On nomme «syndrome de déficience posturale» l'ensemble des possibilités de signes et symptômes plus ou moins présents chez le patient dont le Système Postural ne fonctionne plus de façon optimal.
Lorsque le Système Postural se dérègle, la performance dans l'atteinte des trois principaux objectifs biologiques sera diminuée, ce qui fera apparaître les signes et symptômes propres à chacun de ces objectifs. Ils varieront d’un patient à un autre selon l'âge, le poids, l'ancienneté du déficit, les traumatismes accumulés, le type de travail, les pathologie connexes, etc.
Équilibre
Les troubles de l'équilibre donneront des manifestations diverses: de l'enfant qui chute anormalement, aux vertiges en hauteur, de la sensation d'ébriété qui participe parfois à l'agoraphobie, parfois à la sédentarisation et qui rend périlleux l'approche des escaliers et des dénivellations, et finalement à la chute inexpliquée des personnes âgées. Rien qu'à ce titre, le coût socio-économique des conséquences de la chute des personnes âgées, avec les soins directs et indirects et l'hospitalisation souvent définitive, entraîne une grave pression financière sur le système de santé des pays occidentaux.
Par ailleurs, la juxtaposition d'une autre maladie affectant l'équilibre, comme la sclérose en plaque ou le syndrome de Meunière, aggravera de façon considérable l'altération de l'équilibre.
Plus le système postural est déficient, plus la performance de la gestion de l'équilibre diminue.
On verra donc augmenter les occasions de perte d'équilibre, les vertiges se produiront à une hauteur moindre... jusqu'à se produire sur une chaise. Le patient atteint cherchera à garantir son équilibre dans les foules, en haut des escaliers et évitera les situations à risque comme la bicyclette et certains sports.
Douleur
La gestion des contraintes mécaniques, lorsqu'il y a amoindrissement de la performance du Système Postural, sera moins apte à protéger parfaitement les structures corporelles. L'accumulation des micro-traumatismes, par manque d'auto-protection, favorisera l'installation de douleurs musculo-squelettiques chroniques et de dégénérescence articulaire.
Par ailleurs, la mal-protection des tissus blessés retardera la guérison normale (le plus bel exemple est l'épi-condylite chronique), ou aggravera les douleurs d'une maladie systémique comme la poly-arthrite rhumatoïde.
Notons que cette gestion des contraintes mécaniques est faite 24 heures sur 24. Les douleurs positionnelles (longtemps assis ou longtemps couché) et les douleurs fonctionnelles (qui se produisent au mouvement) sont souvent le reflet du syndrome de déficience posturale.
Dans l'enfance, peu de douleurs seront habituellement manifestes. Quelques plaintes sporadiques, particulièrement aux membres inférieurs, seront rapportés par l'enfant, souvent après une période de jeux intense. À la pré-puberté, les plaintes de malaise ou de légère douleur récurrente inciteront les parents à consulter.
À l'examen médical, aucune lésion ne sera trouvée et la croissance sera accusée. Habituellement, les douleurs intermittentes s'installeront progressivement entre l'adolescence et la trentaine. Malgré les consultations dont la fréquence sera en fonction de l'intensité des douleurs ressenties, le soulagement thérapeutique apporté sera d'une durée de plus en plus courte. Les douleurs deviendront chroniques.
La particularité des douleurs d'origine posturale, contrairement aux douleurs traumatiques, est de s'aggraver avec le temps. Les asymétries posturales étant minimes, ce n'est qu'à long terme qu'elles produiront leurs méfaits.
Le plus bel exemple est l'usure d'un pneu légèrement désaligné par un accident. Il faudra accumuler le kilométrage avant d'apercevoir l'usure inégale.
Chez l'enfant en santé, l'apparition de douleur peut se faire après quelques années de mauvaise gestion posturale.
Chez l'adulte, il peut y avoir quelques mois d'écart. Pour tous, l'installation des douleurs sera typiquement progressive, et plusieurs facteurs feront varier cette vitesse de progression.
Parce que l'installation des douleurs est insidieuse, plusieurs patients auront l'impression que les douleurs ont commencé par un geste simple ou par une activité particulière.
Fatigue
Parce que le système postural n'arrive plus à optimiser les réflexes de l'équilibre, le coût en énergie musculaire progresse avec l'augmentation des oscillations debout et le manque d'harmonie de la marche.
La posture imparfaite augmente aussi la dépense d'énergie par une plus forte sollicitation des muscles en station debout. L'ensemble de ce gaspillage d'énergie apporte au patient atteint une sensation inexplicable de fatigue ou de lassitude.
La fatigue atteindra autant les muscles squelettiques que ceux des yeux. Cette sensation se manifestera particulièrement à l'effort où le patient croira à un manque d'entraînement, une inaptitude corporelle ou, pire encore, une incapacité personnelle à faire des efforts.
En cas de déficience posturale, il y aura augmentation des dépenses énergétiques dans le maintien des différentes postures quotidiennes.
La fatigue induite se manifestera chez l'enfant qui demande à être porté par ses parents, chez l'adolescent qui cherchera à se coucher après l'école ou chez l'adulte qui ne trouvera pas d'explication logique à cette fatigue en regard de l'activité encourue.
Souvent, la sensation de fatigue non proportionnée à l'effort déployé sera interprété, autant par le patient lui-même que par son médecin, comme provenant soit d'un manque d'entraînement physique, soit d'origine psycho-émotionnel ou métabolique.
La déficience de l'oculo-motricité
Parce que l'oculo-motricité est fréquemment perturbée dans les cas de syndrome de déficience posturale, tous les cliniciens ont constaté que les patients atteints présentent aussi un ensemble de symptômes conséquents à la perte de performance de la vision binoculaire.
La capacité de lecture sera affectée: la mémorisation des textes pourra perturber le cheminement scolaire et la lecture apportera de la fatigue oculaire (lire une heure ne devrait apporter aucune fatigue aux yeux) ou des céphalées frontale à la lecture.
Parce que la vision permet de préciser les mouvements de la main dans l'espace, les patients atteints seront victimes de maladresses, heurtant la vaisselle, les cadres de porte et les gens. Une motricité oculaire perturbée rendra aussi difficile la conduite automobile la nuit, à la pluie, dans le brouillard et le trafic, et lors des chutes de neige.
Les fonctions émotives seront fréquemment atteintes. Lorsque nous nous promenons en forêt la nuit, trois sentiments nous assaillent tous plus ou moins.
Le premier est le sentiment d'inaptitude: nous ne pouvons voir ni l'environnement, ni les prédateurs potentiels.
Le deuxième sentiment sera celui de l'anxiété: ne pouvant déceler les dangers potentiels, nous anticipons leurs présences (on a l'impression que les prédateurs se préparent à nous manger). Le troisième sentiment est celui de devoir se cacher.
C'est l'instinct de se terrer pour ne pas être vu. Les patients atteints de déficit oculo-moteur subiront, mais moins fortement qu'en forêt la nuit, les mêmes sentiments. Le profil psychologique de ces personnes sera celui d'un manque de confiance en soi, d'un niveau anormal d'anxiété et elle aura tendance à rester à l'écart des autres afin de ne pas attirer l'attention sur elle.
Ce phénomène passera pour un trouble psychologique, et ne sera pourtant que la conséquence d'une perturbation de la coordination réflexe des muscles externe des yeux, perturbant la vision binoculaire et la perception des distances.
Le site des pathologies
Lorsque le système postural est déréglé, l’origine du dérèglement peut se situer sur chacune des 4 phases de son cycle d’exécution.
Les pathologies de structure
Les asymétries squelettiques, comme la jambe courte et la scoliose, ne se réparent pas. Elles devront être compensées par une attelle, une talonnette ou un corset. Par leur caractère irréversible, elle laisseront une séquelle posturale permanente et nécessiteront une correction elle-aussi permanente. La mise en place de la compensation aura pour effet d'éliminer les symptômes.
Les pathologies du mouvement
Elle sont le reflet de perturbation de la force et de la souplesse, comme le blocage vertébral, l’ankylose articulaire, le trouble ostéopathique, etc. Ces pathologies seront traités par les thérapeutes manuels selon l'indication. Lorsque le déficit postural est ancien, il y aura habituellement une perturbation de la souplesse.
La correction de ce trouble demandera plusieurs séances de thérapie manuelle comme la kinésithérapie, la somatotérapie, l'orthothérapie, la physiothérapie, la chiropractie, l'ostéopathie, etc.
Les troubles de la force sont moins fréquents. On les rencontre lors de mouvements répétitifs comme en médecine du travail et en médecine du sport. Un programme de renforcement équilibrant l'asymétrie de force corrigera le problème.
Les troubles de tonus
La normalisation des capteurs ou de «l'intégrateur» (le système nerveux) sera suffisant et nécessaire pour normaliser le tonus.
Les réflexes posturaux mal-acquis
Le système postural de l'Humain enregistre ses réflexes posturaux entre 1 et 8 ans. S'il a été déréglé pendant cette période, les réflexes acquis seront mal programmés. Il faudra procéder à une reprogrammation posturale, sinon tout traitement sera suivi par une récidive.
Par l'auriculothérapie, plusieurs réflexes peuvent-être traités avec succès. Cet adjuvent est fort utile lors de la reprogrammation posturale.
Les capteurs
Le dérèglement d’un capteur est un dérèglement de sensation. Les pathologies de sensation sont extrêmement fine, et elles ne se mesurent pas directement, c’est le résultat de la perturbation qui se mesure.
Si un organe est asymétrique dans sa structure (ex: pied croche, dent croche...), cela ne signifie pas nécessairement qu’il est inadéquat dans son rôle de capteur. Inversement, l’anatomie adéquate d’un organe ne garantie pas que son rôle de capteur est lui-aussi adéquat.
Par exemple, le pied existe au niveau de la structure avec son squelette. Il existe au niveau capteur avec sa peau. Il existe au niveau du système nerveux avec ses nerfs et il existe au niveau de l’exécuteur avec ses muscles. Donc, un même pied peut avoir des défauts structurels (pied creux, pied plats) et ne pas avoir de défaut de capteur. À l’inverse, nous pouvons avoir un pied qui comporte une anatomie normale, mais dont le rôle capteur n’est pas adéquat.
Ce sont par les différents tests cliniques que nous pourrons distinguer l’origine de la pathologie qui affectera tantôt le rôle de structure, tantôt le rôle de capteur, tantôt le rôle de système nerveux et tantôt le rôle musculaire. Si l’on décide de corriger la structure d’un capteur, il faudra immanquablement réajuster son rôle de capteur. Ceci est particulièrement important lors de travaux dentaire, de pose de lunette ou de fabrication d'une orthèse du pied."
Paul Fecteau (clinique de Posturologie de Quebec)